HIGH LIFE LOW CARBON (Europan 16)

Propositions effectuées dans le cadre de l’appel à projet EUROPAN 16 sur le thème “Villes Vivantes” Vitalités métaboliques & Vitalités inclusives - site de GRENOBLE

Année : 2021
Études conception : INDY Architectes & ArchiSuperStory

Aménagement proposé de la Place du Rabot.

HIGH LIFE LOW CARBON

La neutralité carbone ne peut être envisagée autrement que globalement et transversalement à l’ensemble des pays et de leurs composantes environnementales, sociétales et économiques.

Cependant, et devant une situation climatique de plus en plus critique comme le démontrent les derniers rapports du GIEC, cela n’empêche pas d’expérimenter des stratégies de réponse à l’échelle des territoires. Ce sont ces stratégies qui font actuellement cruellement défaut au niveau des décideurs politiques, qui se heurtent malgré des discours souvent volontaristes à des réalités économiques qui prennent encore trop systématiquement l’ascendant.

Le site de la Bastille et du Rabot à Grenoble sont dans cette perspective une opportunité régionale formidable. Ils offrent toutes les caractéristiques majeures des enjeux à relever si l’on souhaite réellement maîtriser l’impact de nos modes de vie actuels sur l’environnement dans lequel vivront nos enfants : transport et mobilité, infrastructures, modes de consommation, activité économique, agriculture, biodiversité ou encore loisir et tourisme sont autant de thématiques qui peuvent et doivent être abordées.

C’est pourquoi nous avons proposé au travers du présent appel à projet d’envisager l’avenir de ce site complexe et multiple comme un lieu démonstrateur majeur des thématiques de la ville soutenable et des stratégies permettant de réduire le bilan carbone de nos vies quotidiennes. Il est pris le pari que l’ensemble de l’impact carbone et énergie grise des travaux de transformation, des transports, mais également l’impact des activités sélectionnées pour investir les lieux puisse être quantifiées et comparées aux capacités d’absorption de C02 - sur une période de 50 ans - des pentes de la Bastille.

Au-delà d’une intervention se voulant elle-même volontairement exemplaire dans ses parti-pris, il est proposé de faire de ce lieu à terme un véritable observatoire de la ville durable et bas carbone, tout en offrant aux habitants de la région des espaces et infrastructures améliorant le cadre et la qualité de vie dans la ville :

Désenclaver le site sans y faire rentrer la voiture : Le principal enjeu du renouveau du Rabot est son accessibilité. C’est le point de départ majeur de notre proposition. Il est fait le choix de développer le transport par câble déjà très présent sur le territoire (Téléphérique de la Bastille, Metrocâble…) et de renforcer son rôle d’avenir dans les transports urbains. Ce choix associé au positionnement stratégique des gares de départ permet de relier et mailler efficacement le site au reste du territoire (gare du centre-ville, gare de l’Esplanade permettant un stationnement et un accès pour les habitants hors métropole…). Le câble permet en outre une intervention très ponctuelle sur l’environnement, et offre un bilan carbone extrêmement intéressant.

Améliorer le cadre de vie : Le site exceptionnel et les infrastructures existantes doivent permettre d’offrir aux habitants et visiteurs des équipements exemplaires et à la destination de tous. Il en va de la pertinence même de l’acte de construire ou de transformer, qui doit devenir la première question à se poser avant d’engager n’importe quel projet.

La contrainte de la maîtrise du bilan carbone ne doit pas être pour autant limitant dans la notion de plaisir. Au contraire, la réussite du projet passera par une appropriation par les habitants. Il est en ce sens envisagé le site du rabot comme une extension du centre-ville piéton. Ont donc été identifiés des usages variés et complémentaires permettant au lieu de vivre en toute saison, de jour comme de nuit :

- Le site accueillera des équipements et évènements tournés vers l’art de vivre : halle de marché et restaurant bistronomique permettant d’avoir accès à des produits cultivés ultra localement (pentes de la Bastille), ou régionalement (agriculteurs et producteurs). Il est prévu l’installation d’une coopérative des produits de la Chartreuse.

- La pratique du sport (trail, randonnée, vélo électrique..) en fort développement, favorisera le fonctionnement de commerces de vente et de location d’articles de montagne. Il est par ailleurs prévu de transformer la partie basse du site afin d’y aménager un important complexe de sports urbain (baptisé playground), dont l’offre fait défaut à Grenoble : urban foot et basket, escalade/bloc…ainsi qu’une offre de bar/café aménagé sous les arcades des anciennes casernes.

- Le grand bâtiment de l’Esclangon se verra transformé en incubateur à destination de jeunes entreprises ou associations et activités spécifiquement tournées vers la transition énergétique et les innovations/mutations en rapport avec un avenir bas carbone (agriculture, nouvelles technologies, énergie, construction, mobilité…).

- Le fort du vieux Barbillon accueillera quant à lui un Musée et des activités loisirs (escape game historique…) sur la thématique de l’histoire du site.

- Il est enfin prévu la création d’un « Observatoire de la ville durable et bas carbone », dont la mission sera, outre la gestion du site et la sélection des candidats souhaitant y développer une activité, son rôle sera de recueillir des données concrètes et de les comparer avec les prévisions théoriques (énergie consommée, bilan carbone du fonctionnement du site et activités indirectes associées…). Son rôle sera également d’assurer un relai pédagogique et de communication au grand public sur les grandes thématiques liées à l’environnement (expositions, cycles de conférences…). Des ateliers et activités ludiques s’y tiendront pour les enfants.

Agriculture Urbaine : Les lieux identifiés comme porteurs de développement d’une agriculture urbaine diversifiée et locale sont valorisés, les initiatives encouragées et accompagnées par l’Observatoire. Des débouchés à la vente sont notamment favorisés au sein des infrastructures du Rabot (coopérative, marché, restaurants…) afin de faire connaître et d’encourager le développement de ce type d’agriculture.

« Agriculteur Urbain » est l’un des nouveaux métiers d’avenir dans la perspective d’une alimentation en filière ultra courte et responsable. Des sites propices à la culture de la vigne ont notamment été mis en valeur par l’analyse.

Il est prévu dans le cadre du projet la mise à disposition de l’ancien gymnase du Rabot pour l’installation à l’année d’une exploitation viticole et le développement d’un vin récolté, élevé et vendu sur place.

Privilégier la réutilisation des infrastructures existantes : Le projet prévoit de réinvestir et traiter prioritairement les bâtiments existants, dont la nature et la qualité permet de l’envisager. La construction de bâtiments neufs ne doit être envisagée que lorsqu’aucune alternative n’est possible, ou parce-que des contraintes techniques particulières le nécessitent. C’est le cas par exemple des gares de transport urbain par câble qui desservent le site.

Favoriser le respect de la biodiversité : L’intervention prévoit d’ailleurs que la notion de puits de carbone et de refuge de la biodiversité des pentes de la Bastille soit renforcée et expérimentée jusque dans la nature de l’intervention sur les bâtiments en eux-mêmes, puisqu’un concept de réhabilitation thermique dite de « façades bocagères » low tech est proposé, sous forme de façades en bois auto-portantes. Les structures sont constituées d’alvéoles remplies de terres et plantées d’espèce endémiques et variées, pouvant même servir d’habitat aux insectes et à la petite faune, notamment aux oiseaux. Les façades et toitures des bâtiments deviennent donc des petits éco-systèmes à la manière des haies bocagères, également de retour dans les campagnes. Il est par ailleurs envisagé de sanctuariser tous les sites naturels ne faisant pas l’objet d’une réhabilitation ou d’une construction dans le cadre du projet : toute nouvelle construction y sera à l’avenir interdite sauf démonstration d’une utilité publique majeure et absolue.

Economiser l’énergie et rafraîchir la ville : Le concept offre de multiples avantages : la majorité des matériaux étant issus de filières locales (bois de chartreuse), ou du site lui-même et de ses alentours (terre végétale). Contrairement à la technique du pisé, qui nécessite une consistance et une nature de terre particulière obligeant à l’importer depuis des sites d’extraction régionaux, le concept que nous proposons permet d’utiliser de la terre ordinaire, extraite localement, réduisant drastiquement l’impact carbone des travaux de réhabilitation. Ce traitement en murs épais permet d’améliorer fortement le comportement thermique des bâtiments (isolation très performante, apport d’inertie thermique pour un confort d’été de plus en plus important…) mais également de gérer l’eau de pluie :

outre sa capacité de rétention et de tamponnement pour éviter une saturation des réseaux urbains, une grande partie de l’eau de pluie est ainsi réutilisée localement, emprisonnée dans les alvéoles et absorbée par la végétation. Ce qui ne sera pas utilisé par les plantes elles-mêmes sera naturellement évaporé ou drainé gravitairement, permettant par la même de créer un micro-climat qui rafraîchira (free cooling) l’environnement direct des bâtiments, notamment l’été. Ce concept développé à grande échelle permettrait de limiter significativement l’effet d’îlot de chaleur en ville.

Toutes ces propositions ont pour dénominateur commun de faire du site du Rabot un lieu démonstrateur et d’expérimentation autour de la lutte contre le réchauffement climatique, via une démarche urbaine et sociale dont les habitants seraient les acteurs principaux. Nous avons à coeur de porter une vision résolument positive du changement, et de ne pas l’opposer à nos vies quotidiennes comme une contrainte, mais plutôt comme un levier afin vivre mieux et de manière plus respectueuse et responsable de notre environnement.